FONGOD Edwin NUVAGA : Le Parlement n’a pas institué un nouveau droit de sortie sur le cacao exporté en fèves

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FONGOD Edwin NUVAGA Directeur Général des Douanes

Dans cette interview, FONGOD Edwin NUVAGA, le Directeur Général des Douanes (DGD) donne des explications sur la polémique autour de la taxe sur l’exportation des fèves de cacao. Une taxe qui a soulevé un tollé au sein des agriculteurs, inquiets de voir l’Etat bloquer leur activité. Si FONGOD Edwin NUVAGA rappelle que le projet de loi de finances 2023 adopté par le Parlement n’a pas institué un nouveau droit de sortie au taux de 10% en ce qui concerne le cacao exporté en fèves. Il rassure les cacaoculteurs et les acteurs de la filière sur la sauvegarde de leur activité. « C’est l’exportateur qui paie déjà les 10% liquidés actuellement qui continuera de supporter ce prélèvement », conclut-il.

Monsieur le Directeur Général. Dans le cadre de la loi de finances 2023, le Gouvernement a décidé d’augmenter de 10% la taxe sur l’exportation des fèves de cacao. Comment percevoir cette décision ?

Je vous remercie pour l’occasion que vous offrez à la Direction Générale des Douanes pour éclairer la gouverne de vos lecteurs sur certains aspects des mesures douanières contenues dans le projet de loi de finances pour l’exercice 2023 adopté par le Parlement, qui n’a pas encore été promulgué par le Président de la République.

Pour revenir à la question posée, il convient de relever d’entrée de jeu que le projet de loi de finances 2023 adopté par le Parlement n’a pas institué un nouveau droit de sortie au taux de 10% en ce qui concerne le cacao exporté en fèves.

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En effet, le cacao en fèves avait déjà été soumis par l’article deuxième alinéa 1 (c) de la loi de finances pour l’exercice 2017 à un droit de sortie correspondant à 10 % des prélèvements (encore dites redevances) agricoles liquidés par l’Administration des Douanes au profit de divers organismes de promotion de la filière lors de l’exportation du cacao et du café. Ce n’est donc pas un impôt nouveau.

Seule l’assiette, c’est-à-dire la base imposable de cet impôt, a changé. Avant, les 10% étaient déduits des redevances prélevées à l’exportation des fèves de cacao qui sont fixées actuellement à 75 F CFA par kilogramme. Dorénavant, ces 10% seront liquidés directement sur la base de la valeur imposable des fèves de cacao à exporter.

Depuis quelques jours, certains analystes soulignent que cette décision du gouvernement mettra les cacaoculteurs dans une situation extrêmement difficile. Etes- vous du même avis ?

Je ne suis assurément pas du même avis dans la mesure où c’est l’exportateur qui paie déjà les 10% liquidés actuellement qui continuera de supporter ce prélèvement.

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Par ailleurs, s’agissant d’un produit dont le prix de vente dépend essentiellement du cours du marché international, et fait l’objet d’un suivi quotidien par le Ministère du Commerce et les organismes dédiés à la promotion de la filière cacao tels que l’Office National du Cacao- Café, le changement de la base d’imposition de cet impôt ne devrait pas impacter l’activité du cacaoculteur.

D’aucuns plaident pour que le gouvernement ramène cette taxe au moins à 5%. Est-ce encore possible ?

Si l’on va du postulat qu’il ne s’agit pas d’un nouvel impôt institué, mais plutôt d’un changement des modalités de liquidation de celui-ci, je ne vois véritablement pas les raisons qui justifieraient un revirement de l’option gouvernementale.

A titre comparatif, la Côte d’Ivoire est depuis plusieurs décennies le premier producteur mondial de fèves de cacao. Ce secteur représente environ 20% du PIB et 40% des recettes d’exportation. La culture du cacao emploie près de 600.000 planteurs et fait vivre près du quart de la population  ivoirienne, soit environ 6 millions de personnes, selon le Conseil du Café-Cacao. A ce titre, cette filière est le principal pilier de l’économie ivoirienne. Fort de cette perception, en Côte d’Ivoire, les fèves de cacao sont actuellement taxées à l’exportation au taux de 15,5% pour les fèves de cacao et 5% pour le beurre de cacao. Au Cameroun, nous sommes à 10% pour la taxation à l’exportation des fèves de cacao, ce qui est en deçà de ce qui est pratiqué en Côte d’Ivoire.

Si le Gouvernement maintient sa décision, quel sera l’impact sur le développement de la filière cacao ?

Globalement, l’impact serait plutôt positif. En effet, le changement de base d’imposition évoquée tantôt s’inscrit en droite ligne de l’import-substitution qui induit une taxation de nos matières premières exportées en fonction de leur niveau de transformation.

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A travers cette mesure, l’objectif visé est de durcir quelque peu les conditions d’exportation du cacao sous forme de fèves brutes, afin d’encourager leur transformation locale. Les entreprises locales qui ont investi des milliards pour transformer les fèves de cacao avant leur exportation, se sont retrouvées dans une situation de pénurie de matières premières locales, celles-ci ayant été rapidement achetées et sorties du pays par des multinationales. En clair, cette mesure devrait plutôt permettre d’accroitre la chaine de valeurs du cacao dans notre pays, dans la mesure où l’augmentation des capacités de transformation locale engendrera davantage d’emplois, d’impôts internes et de transfert de technologie, contribuant ainsi au rééquilibrage de nos balances commerciale et de paiement.

Interview parue dans L’Economie Qutodien de ce vendredi, 16 décembre 2022.

 

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