Aéroport de Douala : En six ans, la Douane Camerounaise a saisi des drogues d’une valeur de 6,4 milliards de FCFA

0

Lorsque son avion atterrit à l’aéroport de Douala ce 27 février 2024, le passager de Turkish Airlines ne sait pas que son séjour au Cameroun ne se passera pas comme prévu. Le sexagénaire en provenance de Sao Paulo est la cible des équipes de la Douane affectées sur la plateforme aéroportuaire.

Placées sous la supervision de HISSOAK BONGUEN Jean Patrice, Chef du Secteur des Douanes du Littoral II Par Intérim, elles passent les huit colis suspects au peigne fin. Le pot aux roses est découvert. « Après inspection, nos fins douaniers ont constaté qu’il s’agit des chaussures et des sacs à main avec des manches en bois à l’intérieur desquelles étaient soigneusement dissimulées 24,5 kilogrammes de cocaïne, d’une valeur estimée à deux millions de dollars (1 214, 792 milliards de FCFA) », précise la Direction générale des Douanes (DGD). Le prévenu, âgé d’environ 60 ans, et le corps du délit ont été mis à la disposition du Procureur de la République près le Tribunal de Grande Instance de Douala-Bonanjo.

A lire : La douane saisit 70 kg de stupéfiants pour près d’1,738 Mds dans un vol de Rwandair en provenance d’Afrique du Sud

Pour faire passer leurs marchandises « incognito », les contrebandiers usent d’autres subterfuges. Le 16 avril 2025, dans la même plateforme aéroportuaire, le Service des Douanes a saisi une cargaison de 70 kilogrammes de stupéfiants, dissimulés dans des compresseurs d’air en provenance d’Afrique du Sud. Empaquetées dans deux cargaisons distinctes, les stupéfiants sont arrivés par vol Rwand’Air et réparties sur deux lettres de transport aérien (LTA).

Surveillance douanière

Le Forum sur la surveillance douanière du 11 août 2020 à Yaoundé a joué un rôle stratégique dans la métamorphose de la Douane. Administration jadis cantonnée aux méthodes manuelles et physique, elle a fait un bond décisif dans l’utilisation des techniques 2.0 dans sa mission de lutte contre les trafics illicites.

Selon la Direction Générale des Douanes, entre 2020 et mi-2025, les équipes, appuyée par les Forces de Maintien de l’Ordre, ont saisi des drogues, d’une valeur de près de 6,4 milliards de FCFA. « Depuis notre prise de fonction à l’aéroport international de Douala il y a de cela cinq ans, nous avons effectué 16 saisies de stupéfiants, toutes catégories confondues. La cocaïne, la métamphétamine, la kétamine, l’éphédrine. La valeur de ce que nous avons saisi entre 2020 et 2025 près de 6,332 millions de FCFA », confirme le Commandant de subdivision Ngafor

Les criminels usent de divers artifices pour passer entre les mailles du filet. « Les méthodes de dissimulations sont soit sur le passager, soit à l’intérieur du passager, soit sous ses effets. On peut en trouver dans des semelles des chaussures. Nous avons eu des drogues cousues dans le pantalon d’un passager, des drogues mélangées dans la nourriture », décrit le commandant.

Contrôle

Première porte d’entrée du Cameroun (près de 840 000 passagers y ont atterri en 2022 sur une moyenne nationale d’1,498 000 passagers selon le dernier rapport de la CCAA), l’aéroport international de Douala apparaît comme une route privilégiée des réseaux de trafics illicites. Le 27 février 2024, les éléments de la douane interpellaient une cargaison de 15 kg de cocaïne. La drogue, découverte dans un vol de la compagnie turque Turkish Airlines, était dissimulée dans des boîtes et flacons de produits cosmétiques. D’une valeur d’environ 600 millions de FCFA selon les douaniers, la cocaïne était à destination du Sri Lanka.

La recrudescence des saisies notamment dans les plateformes aéroportuaires est-elle le signe d’une montée en puissance des actes des réseaux de contrebande ? Comment la Douane fait-elle pour contrer ces colis préparés par des réseaux sans cesse innovants ? Pour le comprendre, il faut revenir huit ans plus tôt, en 2016. Pour contrer les réseaux de contrebande, l’administration des douanes décide d’opérationnaliser un nouveau dispositif dans les aéroports de Yaoundé et Douala. Il s’agit des cellules aéroportuaires anti-trafic (CAAT), qui constituent l’un des dispositifs de la coopération interne (Douane, Police, Gendarmerie). Dispositif interne auquel on peut ajouter la Convention MINFI/MINDEF relative à la surveillance douanière du plan d’eau.

Lire aussi : ENQUETE: Comment la Douane met les contrebandiers en déroute dans les aéroports

A côté de ce dispositif de coopération interne, la Douane s’associe à deux dispositifs externes. Au niveau régional, à travers le Programme SPC++ (Cameroun, Nigéria, RCA, Tchad, Niger, Benin) ; le protocole d’accord d’assistance administrative mutuelle en matière douanière du 26 août 2016 entre le Cameroun et le Tchad ; et le protocole d’accord d’assistance administrative mutuelle en matière douanière du 28 septembre 2016 entre le Cameroun et la République Centrafricaine. Et au niveau international, avec le programme de sécurité de l’OMD.

Concrètement, indique le capitaine DIMA Quentin, Achille, Chef de Cellule de la Surveillance Douanière le dispositif répressif s’opère de plusieurs manières. « Nous réalisons des contrôles sur pièce. A travers des contrôles de première ligne, les contrôles différés et les contrôles à postériori. Nous pouvons également réaliser des contrôles physiques. A travers les unités de surveillances traditionnelles, les unités de Halcomi (Halte au Commerce Illicite Ndlr.) et la gestion coordonnée des frontières (CAAT) qui vous intéresse en particulier. Un troisième niveau de contrôle est fait grâce aux renseignements. Via le programme SPC++ et les BRLR » précise-il.

Renforcement du dispositif

Au total, sur l’ensemble de l’année 2023, c’est près de 31,77 tonnes de marchandises (cannabis, cocaïne, métaux précieux, etc.) qui ont été saisis d’une part dans les plateformes aéroportuaires, d’autre part aux autres postes frontaliers installés sur l’ensemble du territoire national.

« En matière de surveillance et de sécurité, la Direction Générale des Douanes a participé en 2023 à de nombreuses opérations nationales, régionales et internationales. Parfaitement intégrée dans la communauté nationale de défense et de sécurité, la Direction Générale des Douanes a réalisé d’importantes saisies, d’une ampleur déterminante saluée aussi bien par les pouvoirs publics, les opérateurs économiques, les consommateurs que la communauté douanière internationale », se félicite FONGOD Edwin NUVAGA, Directeur Général.

Ces succès de la Douane restent cependant entachés par de nombreuses faiblesses. Faible sensibilisation des agents relativement aux enjeux sécuritaires ; ignorance et/ou contestation de la mission sécuritaire de la douane par les autres forces de défense et de sécurité ; non maitrise des méandres du commerce virtuel sont quelques lignes de faiblesses relevées par certains observateurs.

Faiblesses que l’administration a commencé à régler dès 2024. En effet, elle a renforcé ses dispositifs de lutte contre le commerce illicite, en collaboration avec les forces de défense, les entreprises citoyennes et les autres administrations publiques. Plusieurs partenariats ont été noués avec des acteurs comme l’Agence Nationale des Investigations financières (ANIF).

Paraphé en 2023, le Protocole d’Accord permet aux deux administrations de créer un cadre de consultation, de concertation, de collaboration, d’échanges de renseignement et de données dans la lutte contre le blanchiment des capitaux, le financement du terrorisme et de la prolifération ainsi que la lutte contre la fraude douanière.

LAISSER UN COMMENTAIRE

Please enter your comment!
Please enter your name here