Jean Pascal Somb LINGOM : « L’Etat doit intégrer la canne blanche dans les programmes des auto-écoles »

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Jean Pascal Somb Lingom

Président de la Dynamique des Aveugles et Malvoyants Intellectuels du Cameroun (DAMIC), Jean Pascal Somb LINGOM et ses camarades handicapés visuels ont récemment organisé une marche de sensibilisation sur les dangers des accidents de la circulation pour les personnes malvoyantes. Il explique dans cette interview les raisons qui justifient l’organisation de ce mouvement, et présente les problèmes que rencontrent les handicapés visuels de manière globale.

Sous le prétexte du décès d’un de vos camarades, vous avez organisé, le 06 août dernier, une marche de sensibilisation sur les dangers des accidents de la circulation pour les handicapés visuels. Pourquoi ?

Vous le dites si bien. Le 28 juillet  2016, notre ami, Alain YODOU, un jeune homme de 31 ans, étudiant en thèse de doctorat à l’Université de Toulouse est percuté au niveau du lieu-dit Pont Emana par un véhicule. Alain YODOU avait fait des signes pour traverser la route, mais l’automobiliste n’a pas estimé nécessaire de s’arrêter.

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Depuis 2017, nous nous sommes dit que non seulement il faut sensibiliser les automobilistes, les usagers de la route, les moto-taximen sur la nécessité de respecter la canne blanche. Mais il faut également pérenniser la mémoire de ce jeune monsieur, symbole de réussite, symbole d’engagement pour un pays dans lequel les conditions des déficients visuels sont difficiles. Un pays où il est difficile pour un jeune handicapé de se mouvoir dans la voirie publique.

Nous nous sommes dits, il faudrait que chaque année, vers cette période-là, nous commémorions cette perte. Notre idéal c’est que nous célébrions ce jour le 28 juillet. Mais comme ce n’est pas toujours évident, parce que ça peut tomber en semaine, nous avons pris la décision de le faire généralement pendant la première semaine du mois de juillet, ou la première semaine du mois d’août.

Quel message vous passez à travers cette manifestation ?

Nous voulons dire à tous les camerounais que les accidents de la route, les accidents de la circulation ne concernent pas que les handicapés de la vue, ou les personnes handicapées en général. Ça nous concerne tous. Je suis surpris de constater que malgré la large diffusion que nous avons faite, nous ne soyons pas un millier aujourd’hui. En fait, nous devions être aussi nombreux que possible pour dire stop à ce genre de chose.

Vous soulevez le problème des accidents de la circulation. Mais ce n’est pas l’unique problème que rencontrent les handicapés visuels. Quelle est la situation de manière globale ?

S’il fallait essayer de catégoriser les problèmes auxquels font face les handicapés de la vue au Cameroun, on parlerait de trois niveaux. Il y a l’insertion socio-professionnelle, il y a l’insertion scolaire et académique, et il y a l’insertion au niveau des instances de prise de décision.

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Quand je parle de l’insertion socio-professionnelle, je parle des différents aménagements sociaux. Il faut que les voiries, les immeubles, les infrastructures, soient adaptées aux personnes handicapées. Au niveau de l’insertion professionnelle, c’est avoir plus d’opportunités de travail pour ces personnes-là. Au niveau de l’insertion scolaire et académique, c’est de se rassurer que ces personnes étudient dans les meilleures conditions leur permettant d’atteindre les meilleurs résultats, en dépit de leur handicap.

Le dernier niveau, qui est celui de l’insertion au niveau des instances de décision, c’est se rassurer que les handicapés en général, et les déficients visuels en particulier se retrouvent où les décisions en leur faveur sont prises. Pour que rien ne soit fait pour eux, sans eux. Avec le risque que cela soit mal fait.

Quelle sera la suite après cette initiative ? Comment comptez-vous impacter positivement les pouvoirs publics, pour que des mesures soient prises dans le sens de vos revendications ?

La question du handicap est transversale. Elle implique à la fois le ministère des Transports, le Ministère du Développement Urbain et de l’Habitat, et d’autres structures. Parlons par exemple du Ministère des Transports. Nous souhaitons que dans les auto-écoles, une insistance soit faite au niveau de la canne blanche.

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De sorte que lorsque quelqu’un a son permis, qu’il maîtrise la canne blanche. Nous interpellons même la DGSN, pour qu’on se rassure que même les moto-taximen passent par les auto-écoles. Pour qu’un conducteur de moto-taxi ne prenne pas la moto sans savoir ce que signifie la canne blanche.

Interview avec Frégist Bertrand TCHOUTA

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