Participant aux travaux de la 30ème réunion du comité des Experts de la 31ème conférence des Directeurs Généraux des Douanes de la Région OMD-AOC à Kinshasa en RDC, David Clovis UM BATTA, Chef de la Cellule de la Coopération Internationale, a reçu son certificat d’accréditation en qualité d’expert en matière de règles d’origine de l’Organisation mondiale des Douanes. Instant de solennité puisqu’il a reçu cette consécration des mains de Ian SAUNDERS, du Secrétaire Général de l’OMD, en présence des Directeurs Généraux des Douanes de la Région OMD-AOC. Dans cette interview, il explique l’importance de ce mécanisme pour l’administration des Douanes du Cameroun.
D’où vous est venue l’idée de postuler pour l’accréditation en qualité d’Expert Formateur de l’OMD dans le domaine des Règles d’Origine ?
En marge de la 28ème Conférence des Directeurs Généraux des Douanes de la Région OMD-AOC à Brazzaville au Congo des 26 et 27 mai 2022, et à l’issue de la présentation du Projet Conjoint OMD-JICA relatif au Programme des Maîtres Formateurs (PMF) sur les Règles d’Origine sur la période 2021-2024, monsieur le Directeur Général des Douanes a manifesté un intérêt tout particulier des Douanes Camerounaises à y prendre part bien que cette candidature intervienne un an après le démarrage du projet.
Rendez-vous lui sera donné à Bruxelles, au siège du Secrétariat de l’OMD, en marge des 139ème/140ème sessions du Conseil de Coopération Douanière pour les modalités de saisine de l’instance faîtière des Douanes. De retour au Cameroun, le Directeur Général des Douanes adressera une lettre de candidature à Monsieur le Secrétaire Général de l’OMD en lui proposant 2 candidats audit Programme.
Les deux candidats du Cameroun seront ensuite retenus : notre regretté collègue Etienne SAMA II et moi. Comme vous le savez, je poursuivrai péniblement, après cette tragédie innommable, l’expédition plus tard avec le Dr ESSOLA Eddy Michel, et nous serons tous les deux certifiés Maîtres Formateurs sur les Règles d’Origine au terme du Programme le 07 juin 2024 à Dakar. Suivront les étapes de la pré-accréditation le 14 juin 2024 à Dakar et de l’accréditation à Cotonou le 16 juin 2025.
Qu’est-ce que les règles d’origine ?
L’origine, aux côtés de la valeur en douane et du classement tarifaire (SH) est l’un des trois piliers de la taxation douanière, épine dorsale du métier douanier au sens strict, est également un critère fondamental dans les échanges internationaux. Il convient, bien entendu, de distinguer l’origine des marchandises de leur provenance.
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Les règles d’origine permettent de déterminer la « nationalité économique » (différent de la nationalité géographique) d’une marchandise donnée.
Selon la Convention de Kyoto Révisée (annexe spécifique K, chapitre 1), les règles d’origine sont les dispositions spécifiques appliquées par un pays pour déterminer l’origine des marchandises et faisant appel à des principes établis par la législation nationale ou par des accords internationaux. On peut trouver les règles d’origine dans : la Convention Kyoto Révisée (premier instrument de référence en la matière) ; l’accord de l’OMC sur les règles d’origine ;
– les accords de Libre-échange/ les accords commerciaux régionaux/système de préférences généralisées/accords de partenariat économique ; les législations nationales.
Les règles d’origine sont au cœur des stratégies et des négociations commerciales et donc du commerce international. Elles sont une arme redoutable pour la guerre économique des temps modernes et suscitent des débats houleux de notre ère au regard de l’actualité commerciale récente.
Quelle est l’importance des Règles d’Origine dans le travail quotidien des douaniers ?
Il convient de distinguer les règles d’origine non préférentielles des règles d’origine préférentielles.
Les règles d’origine non préférentielles en vigueur en l’absence d’un accord commercial entre deux ou plusieurs États ou territoires sont utilisées aux fins de mesures politiques commerciales telles que les droits anti-dumping et droits compensatoires, les statistiques commerciales ; le marquage d’origine ; le traitement de la nation la plus favorisée (NPF) ; les mesures de sauvegarde ; les restrictions quantitatives ou contingents tarifaires ; les marchés publics.
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Les règles d’origine préférentielles en vigueur dans le cadre des accords commerciaux préférentiels permettent de : garantir que l’accès préférentiel soit réservé uniquement aux marchandises provenant d’un Etats partie à la zone/accord de libre-échange, qui remplissent les critères requis ; d’éviter le détournement des échanges ; d’empêcher l’importation de marchandises dans la zone de libre-échange via l’Etat partie ayant le tarif extérieur le plus bas (distorsion des échanges) ; et de maintenir le tarif douanier extérieur entre États sans régime préférentiel : pas de traitement préférentiel et droits de douane perçus selon le principe de la Nation la Plus Favorisée (NPF).
Sous ce rapport le rôle de la Douane est crucial pour garantir l’application harmonieuse et conforme des règles d’origine en tant qu’organe bénéficiant de l’expertise technique en la matière ; assurer en qualité d’autorité compétente, la certification et la vérification de l’origine des marchandises ; délivrer les décisions anticipées sur l’origine ; assurer les contrôles a posteriori sur l’origine ; assurer la gestion des risques en matière d’origine ; etc. A ce titre, une parfaite maîtrise des règles d’origine est requise.
A qui dédiez-vous cette réussite ?
Les règles d’origine sont une discipline complexe qui ne suscite pas particulièrement beaucoup d’enthousiasme auprès des fonctionnaires des douanes en général ; en dépit de leur caractère stratégique dans le commerce international moderne. Elles requièrent de solides acquis à la fois du SH et de l’évaluation en douane. Il s’agit d’un domaine d’actualité compte tenu de la montée fulgurante du nombre d’accords de libre-échange et du chevauchement des règles d’origine dû à ce foisonnement.
C’est une discipline encore en friche et dans laquelle, le volume de travail à réaliser demeure considérable. Elle requiert donc plus de persévérance et d’abnégation. C’est précisément pour cette raison que je dédie cette belle réalisation à tout le personnel des Douanes Camerounaises (en les invitant à s’y intéresser davantage), à Monsieur le Directeur Général des Douanes et, bien évidemment, à la mémoire de notre regretté collègue Etienne SAMA II qui a démontré une passion toute singulière en cette matière, aux aurores du programme dédié qu’il a prématurément quitté.
Cette accréditation est la toute première en matière de règles d’origine pour le Cameroun et l’Afrique Centrale. L’urgence de nouvelles accréditations peut se justifie donc à plus d’un titre ; d’où mon appel itératif et incessant à l’attention de nos plus jeunes collègues dont les ressources physiques et intellectuelles sont encore intactes et à même de permettre à notre pays d’engranger davantage de lauriers, d’expertise et de reconnaissance à l’international.
Quels conseils pour les futurs candidats et en quoi sera fait votre avenir au sein de l’OMD ?
Nous plaidons pour plus de candidatures des Douanes Camerounaises lors des prochains ateliers de pré-accréditation et d’accréditation dans toutes les disciplines ouvertes et invitons nos collègues à s’y préparer de fort belle manière, car il ne s’agit ni de balade de santé ni de villégiature. Lors de ces sessions, l’on rivalise avec les meilleurs candidats des autres administrations face aux examinateurs spécialistes des sujets divers de l’OMD reconnus pour leur rigueur scientifique et leur impartialité méthodologique. La plupart de nos collègues sont à la hauteur desdites évaluations hautement sélectives et rigoureuses.
Nous envisageons de proposer à l’attention de Monsieur le Directeur Général des Douanes dans les prochains jours, un processus de sélection et de préparation de nos meilleurs candidats aux prochaines sessions de pré-accréditation et d’accréditation de l’OMD. Le vivier domestique hautement élitiste d’experts accrédités de l’OMD sera spécialement mis à contribution dans ce sens.
Quant moi, je continue d’être principalement au service de mon administration et de mon pays, mais aussi, et à toute réquisition, au service des 185 autres administrations membres de l’OMD, conformément au nouveau paradigme de renforcement des capacités de l’OMD axé sur la domestication de l’expertise douanière internationale.
