Présidentielles 2025 : L’Ordre des Ingénieurs de Génie Civil du Cameroun interpelle les candidats sur le mauvais état des routes

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Etat de la route Edéa-Kribi septembre 2024

La Campagne présidentielle est désormais officiellement lancée. Alors que les candidats se déploient sur le terrain pour cette dernière ligne droite, l’Ordre National des Ingénieurs de Génie Civil du Cameroun (ONIGC), leur adresse un manifeste qui met en lumière les défis criants du secteur des infrastructures routières et le rôle trop souvent marginalisé des ingénieurs dans la conception et leur suivi de ces infrastructures.

Dans un document intitulé « Bâtir mieux, bâtir vite, bâtir juste », l’organisme corporatiste pose 15 questions au candidat sortant Paul BIYA et à ses Chellengers dans la course pour la prise d’Etoudi. La première question, probablement la plus frappante, porte sur la route Nationale N°3 (Yaoundé-Douala-Idenau). Aux candidats à la présidentielle, l’ONIGC demande : « Pourquoi faut-il encore plus de 5 heures pour parcourir les 250 km entre Yaoundé et Douala (les deux poumons du Cameroun) alors qu’ailleurs cette distance est franchie en moins de 2 heures grâce à des réseaux de transport multimodaux performants ?

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Appuyant sur cette même plaie du mauvais état des routes, l’ONIGC ajoute : « Comment comptez-vous assurer un entretien régulier et préventif de notre réseau routier, plutôt que des réparations coûteuses et inefficaces après chaque saison des pluies ? », et « Que ferez-vous pour que les nombreux projets annoncés parfois de longue date (autoroutes et grands axes routiers, voies de contournement, tramways, zones industrielles, cités modernes, complexes sportifs, …) deviennent des réalisations concrètes ? »

SND30

Une première salve de questions qui, au-delà de décrire la qualité exécrable de certains axes routiers de grande importance, cache mal la bile qu’a aujourd’hui l’Ordre des Ingénieurs sur la qualité d’exécution des projets routiers.

Mais dans son « Manifeste », l’ONIGC ne s’attaque pas qu’à l’exécution des projets. Il interroge aussi sur la concrétisation, la mise en œuvre des projets. Notamment ceux fixés par la SND30, qui peinent à être atteints. Bon à savoir, dans sa partie consacrée au développement des infrastructures routières par exemple, la SND30 prévoit de « Bitumer au moins 6 000 km de routes (avec une priorité pour les 4 800 km de routes nationales encore en terre) à l’horizon 2030 ».

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Cinq ans après le lancement de cette feuille de route, les objectifs à mi-parcours sont loin d’être atteints. Sur une cible intermédiaire de 3000 km de routes, le Ministère des Travaux Publics revendique la construction de 2170 km. Soit un gap de 830 km non construits. D’où la question de l’ONIGC : « Que mettrez-vous en œuvre pour transformer la Stratégie Nationale de Développement (SND30) d’un document sur le papier en une réalité vécue par tous les Camerounais y compris en zones anglophones ? »

Coûts élevés des infrastructures, promotion des matériaux locaux, amélioration de l’offre d’emplois pour les ingénieurs camerounais, qualité des infrastructures…le manifeste de l’ONIGC aborde toutes les questions fondamentales.

« Comment comptez-vous réduire les coûts de construction des infrastructures, parmi les plus élevés au monde, qui empêchent de bâtir routes, logements et équipements publics en quantité suffisante ? », demande par exemple l’ONIGC aux candidats. « Quelles mesures prendrez-vous pour encourager l’utilisation des matériaux locaux et développer une véritable industrie nationale du bâtiment et des travaux publics, compétitive et accessible ? ».

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« Comment réformerez-vous le système de passation et d’exécution des marchés publics, aujourd’hui synonyme de lenteur, de manque de transparence et de fragilisation des entreprises locales sans oublier les dérives de la CDEC sur le sens même des cautions ? ».  Ou encore « Que ferez-vous pour que les Ingénieurs de Génie Civil – aujourd’hui souvent sans emploi, sous-payés ou précarisés voire méprisés – pour ceux qui exercent enfin leur noble public – retrouvent la place, la dignité et les perspectives qui devraient être les leurs dans un pays en développement ? ».

Sortie non-partisane

A ceux qui se laisseront le loisir d’interpréter ce manifeste comme une consigne de vote, ou une orientation des électeurs vers certains candidats au détriment des autres, l’ONIGC fait un rappel fort pertinent. « Nous, Ingénieurs de Génie Civil du Cameroun, portons la voix d’une profession engagée mais trop souvent marginalisée. Nous reconnaissons que des infrastructures importantes ont été réalisées au cours des dernières décennies (routes, ponts, barrages, ports et certains équipements publics). Ces efforts méritent d’être salués », écrit l’ONIGC.

« Mais, relativise l’organisme, dans un pays qui doit encore bâtir davantage et mieux, les défis restent considérables : nos routes continuent de se dégrader, des immeubles s’effondrent, nos villes se développent sans plan cohérent, et beaucoup de jeunes ingénieurs partent faute de perspectives solides ». L’ONIGC insiste donc sur une chose : « Notre démarche n’est pas d’accuser, mais d’interroger. Nous posons ces questions au nom de la sécurité des citoyens, de la compétitivité de notre économie et de la dignité d’un pays qui veut compter parmi les émergents ».

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