Non, monsieur le Ministre. La police ne demande pas aux « malfaiteurs » de se livrer. Elle les traque et les met hors d’Etat de nuire. Vous ne pouvez pas demander aux opérateurs de transport interurbain de personnes de vous « faire tenir sous huitaine les listes de tous (leurs Ndlr.) conducteurs, assorties des photocopies de leur permis de conduire ainsi que les photocopies des cartes grises de tous leurs véhicules ». Alors que vous savez très bien que dans certaines compagnies, les chauffeurs changent au gré des patrons, et que les véhicules utilisés pour certains voyages ne proviennent parfois pas du parc automobile de ladite compagnie.
Vous ne réussirez jamais, en restant dans votre bureau climatisé, à démanteler les stratégies mises en place par certains promoteurs pour gagner plus. Exiger à tout promoteur de « Transmettre systématiquement, pour tout dossier de demande d’agrément, les photocopies des permis de conduire des conducteurs, leur affiliation à la CNPS et la liste des véhicules à exploiter » n’est qu’une mesure administrative.
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Cameroun-Accidents de la circulation: Pourquoi la situation du Ministre des Transports m’émeut !
Elle ne les oblige pas à reverser régulièrement les cotisations sociales du personnel. Seules les visites inopinées, et les contrôles réguliers dans les agences (et parfois sur la route) mettront fin à ces pratiques.
Non, monsieur le Ministre, la durée du voyage sur un axe routier ne se décrète pas
Pour la première fois au Cameroun, nous assistons à une institutionnalisation de la durée du voyage sur les axes du triangle de la mort. Cinq heures de voyage sur les routes Yaoundé-Bafoussam et Douala-Yaoundé ; six heures sur les axes Douala-Bafoussam et Yaoundé-Bertoua. Pour les voyages de nuit, les calculs sont simples. Il suffira de faire un ajout de deux heures sur la durée minimale de trajet pour savoir combien de temps il faut pour rallier chacune de ces villes. Ouf ! Il s’en est fallu de peu pour que le ministre établisse un tableau national présentant les heures de voyage sur tous les axes routiers du Cameroun (Yaoundé-Ebolowa ; Ngaoundéré-Garoua, Maroua-Mora, Bafoussam-Bamenda…).
Les ingénieurs en herbe, en formation à l’Ecole Nationale supérieure des Travaux Publics et dans les autres écoles privées peuvent désormais jeter leurs cahiers. La vitesse de référence, et les signalisations, qui sont restés jusqu’ici les boussoles du conducteur sur la route n’ont plus d’importance. Seul compte le timing officiel décrété par le Ministre des Transports. Non, monsieur le Ministre, la durée du voyage sur un axe routier ne se décrète pas.
La culpabilité du chef d’agence
Ceux qui, comme BOUGNA suggéraient au ministre de renforcer les signalisations verticale et horizontale, d’accélérer le transfert des compétences (mais aussi des finances) aux Collectivités territoriales décentralisées pour qu’elles mènent à bien leurs missions en matière de sécurité routière n’ont qu’à aller voir ailleurs…
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Dans un environnement encore plombé par l’instabilité professionnelle et la précarité de l’emploi, le Ministre des Transports place le chef d’Agence au cœur de l’activité des compagnies de transport interurbain de personnes. Ce sera désormais lui le premier responsable en cas d’accident. En tout cas, écrit le Ministre, le chef d’agence doit « mettre en place une fiche de suivi automobile jointe au bordereau de route sur laquelle sera mentionné l’état technique du véhicule, ainsi que l’état physique du chauffeur devant prendre la route. Cette fiche de suivi sera signée par le chef d’agence, afin que sa responsabilité soit engagée ».
C’est une erreur, et pour plusieurs raisons. Sur le principe, le chef d’Agence ne recrute pas les chauffeurs. Dans certains cas, il ne peut pas s’opposer aux décisions de sa hiérarchie (la Direction générale). Il n’achète pas les véhicules de la flotte. Il a donc, au sein de l’agence, des missions très limitées. Lui imputer la responsabilité d’un accident de la circulation revient à renier toute la chaîne des responsabilités qui place le chauffeur comme premier responsable.
Etat technique du véhicule
Non, monsieur le Ministre. Vous ne pouvez pas demander aux compagnies de transport interubain de personnes d’ « Installer des ceintures de sécurité fonctionnelles dans les véhicules pour tous les passagers et de s’assurer de leur port par ces derniers lors des voyages ». C’est une sortie qui soulève un certain nombre d’interrogations. Ces véhicules sont-ils entrés sur le territoire national sans ceinture de sécurité ? Les ceintures de sécurité sont-elles enlevées par les transporteurs ? Le Cameroun qui n’a pas d’unité de montage de véhicules fabrique-t-il des ceintures de sécurité qui seront « installées » dans les véhicules ? Comment un véhicule sans ceinture de sécurité fait-il pour obtenir une vignette de visite technique automobile ?
Non, monsieur le Ministre. Votre dernière sortie, loin d’apporter une véritable solution aux accidents de la circulation, rend plus complexe votre stratégie. Sur la dizaine de mesures annoncées, seules trois permettront d’avoir une réelle avancée. « Mettre un terme sans délai à toute nuisance sonore qui pourrait empêcher le repos du chauffeur au sein du terminal » ; réaliser « des contrôles inopinés de conformité en liaison avec les autres Administrations compétentes au sein des sites de chargement des carrières et des zones d’exploitation » ; et « les sanctions immédiates » qui peuvent être prises en cas de « refus d’obtempérer lors des opérations de prévention et de contrôle routiers par les transporteurs routiers de marchandises diverses par camions, à l’exception de ceux en transit (à contrôler dans les check-points conventionnels) ».
Frégist Bertrand TCHOUTA, Directeur de la Publication, BOUGNA