Après son accident de la circulation, voici le témoignage troublant de Martine Aïcha MENGUE NDENGUE

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Martine Aïcha MENGUE NDENGUE

*Ce n’etait pas mon jour…*

Dimanche 17 Mai 2020, un jour pas comme les autres… normal, j’ai un challenge professionnel en fin de soirée. Un moment qui ne représente quasiment rien pour des habitués mais qui pour moi constitue une scène d’auto-évaluation et d’évaluation.

Il est 20h50 lorsque la présentatrice du 20h30 passe l’antenne à celle de Scènes de Presse pour planter le décor de l’émission de débat dominical sur la CRTV. J’apparais toute souriante aux côtés de l’invité du jour, le Directeur de l’hôpital Jamot de Yaoundé avec qui je dois évoquer les traitements efficaces contre la pandémie à Coronavirus au Cameroun.
21h15, l’antenne est à nous. Scènes de Presse démarre. Les projecteurs en rajoute aux couleurs chatoyantes de ma tenue, le make-up est parfait et je suis plus qu’à l’aise face à mon invité dans un échange modéré par la présentatrice.

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*Et pourtant…* Que ne peut-on pas faire pour satisfaire aux exigences professionnelles!

Derrière ce sourire empreint de rigueur qui ne me quitte pratiquement jamais, se cache une réalité. Celle d’un métier que j’ai choisi et que j’exerce avec passion: le Journalisme. Lui qui ne connait ni week-end, ni jour férié, ni amertume, ni émotion, ni incident, ni accident,
*Et pourtant…*

Un peu plutôt, aux environs de 15 h ce même dimanche alors que parcourais l’axe Sangmelima-Mbalmayo-Yaoundé, une scène mémorable, une de celles que l’on oublie jamais: un gros porteur heurte le véhicule à bord duquel je me trouve à Nkolnya par Nkolmetet. Le véhicule, déséquilibré, ira dans sa course folle ramasser au passage un poteau électrique, faisant en quelques secondes un tonneau tel les roulades des jeux olympiques, avant de se dresser orageusement devant une maison d’habitation. Le temps avait suspendu son envol, juste le temps de réaliser que nous n’étions ni en enfer, ni au paradis mais bel et bien sur terre. La réalité autour de nous et faite de cris et de pleurs des populations nous rappelaient bel et bien que nous étions vivants après ce spectacle macabre offert en quelques secondes sur cet axe. L’intensité des pleurs de ces riverains faisaient assurément croire qu’il n’y avait aucun survivant. Et pourtant… nous étions vivants, du moins nous car, il ne m’avait pas fallu des minutes entières pour constater que le véhicule avait succombé.

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En quelques secondes et aidée par le commandant de bord du véhicule, je me libérais de ma ceinture de sécurité. La tâche ne fût pas aisée car le rouge sur ma peau couleur ébène n’était que la marque de cette secousse violente sur mon coude et mon genou endoloris. Je reprenais peu à peu mes esprits malgré cette douleur poignante au niveau du crâne, je devais faire bonne figure devant ces riverains, les rassurer et surtout regagner au plus vite Yaoundé!

Les minutes d’après furent des plus éprouvantes, le temps allait à la vitesse de Usain Bolt, entre les premiers soins au centre de santé du coin et les échanges avec le gendarme dépêché sur les lieux par la brigade de Nkolmetet, je n’avais qu’une seule obsession, celle de rallier Yaoundé pour honorer le RDV pris avec les téléspectateurs de Scène de Presse. Je n’ai pas conscience de ce que je viens de vivre, je trouve toutes ces procédures lentes…

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Il est 19h20 lorsque je quitte (enfin) la gendarmerie de Nkolmetet à bord du pick-up dépêché par un grand frère à moi à Mbalmayo. Je me dis que c’est faisable le trajet fait 1h de temps. Malheureusement avant le péage de Nsimalen, l’inattendu: un bouchon interminable, décidément! Je commence à perdre espoir. Comment expliquer mon absence aux téléspectateurs ? Je fais un message WhatsApp à la présentatrice pour lui dire de commencer par le 2eme plateau, une option qui allait bouleverser toute l’émission. Heureusement la situation se décante. 20h40, je suis à Mballa II, je peux enfin pousser un Ouf de soulagement. Je prends immédiatement la direction de la salle de maquillage. Au préalable, j’avais choisis une tenue avec un veston pour couvrir les bandages au niveau de mon coude. Le regard inquisiteur des maquilleuses m’obligeât à marmonner quelque chose… un accident. Je n’en dis pas plus car je devais me concentrer sur l’émission en mettant momentanément dans un tiroir, toutes ces émotions… Le make-up et le coup de peigne terminés, me voilà donc scintillante sur le plateau.

*Et pourtant…*

1h d’échange plus tard je sors du plateau et je raccompagne mon invité. C’est à mon retour en salle de maquillage que j’éclate en sanglots. J’avais besoin d’évacuer et en même temps, je réalisais que j’étais vivante et que j’avais honoré ce rdv avec les téléspectateurs.

J’ai surtout pris conscience du fait que la mort m’a fait une caresse froide. Elle ne m’a sûrement pas trouvé à son goût et s’est contentée du véhicule. J’ai pensé furtivement qu’elle avait aussi honoré le rendez-vous avec les téléspectateurs et conséquemment, respectait mon métier.
Oui c’était bel et bien un accident grave, très grave même.
Hélas pour la grande faucheuse ! Ce n’était pas mon jour…. DIEU est AMOUR !

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