Arrivée de KMT, départ de KPMO, conflit avec KCT perspectives du PAK, Patrice MELOM parle…

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Patrice Melom, DG du Port Autonome de Kribi

Vous venez de signer avec KMT la convention de concession sur le Terminal Polyvalent du Port Autonome de Kribi. Peut-on parler d’aboutissement, de soulagement ?

Vous utilisez-là des mots très importants. Aboutissement, oui. D’une procédure. Vous savez très bien que nous sommes dans la deuxième procédure de sélection d’un opérateur sur ce terminal.

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C’est un aboutissement parce qu’il y a eu des étapes dans la sélection de cet opérateur. C’est une procédure qui a été soutenue, qui a été suivie. Pour le soulagement, oui, c’est un soulagement. Au terme d’une procédure comme celle-là, nous ne sommes que soulagés de voir qu’elle aboutisse. Je ne boude pas mon plaisir à constater que noua ayons enfin signé avec ICTSI. Un opérateur de référence.

Sur l’argent apporté par KMT, les informations mises à la disposition de la presse par le PAK sont très avares. Pouvez-vous nous dire, monsieur le Directeur Général, combien ICTSI, à travers sa filiale KMT, va verser en termes de redevance fixe et variable au Port Autonome de Kribi ?

Il y a des informations chiffrées que nous ne souhaitons pas diffuser ainsi. Mais sur le droit d’entrée est très illustrative. KMT va verser 30 milliards de FCFA. Le minimum qu’on avait demandé c’était 15 milliards.

Comme je l’ai dit lors de la signature, ça demeure quand même un saut dans l’inconnu. Ça veut dire qu’ils croient au potentiel du Port Autonome de Kribi. Je peux aussi vous donner d’autres chiffres. L’investissement de KMT va faire est au-delà des 50 milliards de FCFA. C’est très ambitieux. Vous n’imaginez pas que des gens investissent autant d’argent pour venir s’amuser ici. Ce ne sont pas des philanthropes. Ils viennent ici pour faire du business. Et c’est tout au bénéfice du Port de Kribi.

Le nouvel opérateur entre dans un contexte difficile. Marqué notamment par une réticence de la part d’une certaine partie de l’opinion qui voit en ICTSI une multinationale ayant une mauvaise réputation. En termes de traitement de son personnel, mais aussi sur les rapports qu’elle entretient avec les pays où elle est installée. Cela ne vous inquiète-t-il pas ?

De toutes les manières, nous avions un cahier de charges. Neuf candidats se sont prononcés au départ. Après une première pré-sélection ils étaient cinq. Finalement, c’est ICTSI qui a été sélectionnée. Sauf à estimer que nos critères n’étaient pas bons, mais c’est ceux que nous avons estimé importants pour le développement du terminal Polyvalent à ce stade de la mise en place du port. Nous confirmons qu’ils ont passé toutes les étapes.

Je dois d’ailleurs rappeler que pendant les premières procédures qui ont eu lieu en 2014 et 2015, ICTSI était dans la course. Que ce soit sur le Terminal à conteneurs ou sur le Terminal Polyvalent. Ils étaient deuxièmes. Le fait qu’ils soient revenus en faisant des propositions aussi ambitieuses montrent qu’ils tiennent à cette plateforme. Et en face d’eux, il n’y avait pas de concurrent.

Avant la signature du contrat de concession, les camerounais de KPMO ont rappelé leur volonté de prendre une part « importante » dans le capital du nouvel opérateur. Importante parce qu’ils ont trouvé insuffisantes les parts réservées par ICTSI, souhaitant une revalorisation de cette part, notamment pour avoir un mot à dire dans la gestion de ce terminal. Vous ont-ils contacté sur ce sujet ? Avez-vous prêté une attention favorable à cette doléance ?

Je ne me souviens pas avoir reçu des doléances dans ce sens. Un contrat se négocie entre les parties. Ce contrat est négocié depuis un certain temps. On attendait sa signature. C’est ce qui a été fait. Je suis désolé. Je vous ai parlé de parties, il y en a deux. KPMO ne fait pas partie de ces deux. Peut-être qu’ils ont soumis leurs doléances au niveau du gouvernement. Mais nous n’en avons pas reçu.

Parlons d’un autre dossier tout aussi complexe que vous avez été appelé à gérer. C’est celui du concessionnaire du Terminal à conteneurs, Kribi Conteneur Terminal KCT. En début d’année, ils ont défrayé la chronique sur les arriérés de paiement de la redevance fixe et variable. Nos informations laissent croire qu’il y a eu des paiements début juin. Ce problème est-il résolu aujourd’hui ?

Je suis heureux de constater que BOUGNA suit vraiment au jour-le-jour l’activité du Port Autonome de Kribi. Je suis tenté de vous demander quand est-ce qu’on a payé mon dernier salaire (rires). Je ne sais pas par où il faut commencer.

Pour que les gens comprennent bien, nous avons un contrat qui prévoit par exemple que si un des deux partenaires estime qu’il ne trouve pas son compte, il y a des dispositions qui prévoient qu’on s’asseye. Il y a un Comité de suivi qui se réunit pratiquement tous les trimestres, parfois tous les semestres. Ici, on traite de la vie de tous les jours.  Il y a un problème d’exploitation à tel endroit, on discute, on trouve une solution.

Puis, il y a une réunion d’évaluation. C’est quelque chose de bien plus costaud, qui est prévue tous les trois ans, et à l’issue de laquelle on peut aboutir à des modifications de contrat s’il est prouvé que l’équilibre économique du contrat est mis à mal. Exceptionnellement, le contrat prévoit que même avant ces trois ans, si quelqu’un se trouve lésé, asphyxié, il peut également saisir cette réunion d’évaluation. Et c’est ce que KCT a fait.

KCT se plaint depuis un certain temps, de ce que le trafic n’est pas bon, qu’il perd de l’argent. Malgré les conditions d’assouplissement que nous avons essayé de mettre sur pied. Et c’est une vérité. On démarrait à partir de presque rien. Eux, ils avaient des engagements. Les chiffres sont têtus, effectivement, KCT perd de l’argent. Maintenant, c’est à cause de qui, c’est à raison de quoi ? Ils ont raison de pointer du doigt sur le gouvernement. C’est effectivement ce que le gouvernement avait promos.

D’aménager des dessertes, etc. Et même, les prévisions sur la base desquelles KCT fait son offre à l’époque était basées sur le trafic que le gouvernement annonçait aussi. Le fer de Mbalam qui devait arriver, l’aluminium, etc. Aujourd’hui, il y a un certain nombre de choses qui ne sont pas réalisées. Et la vérité c’est que le trafic n’est pas tout à fait au rendez-vous. Il y a une petite montée en puissance, mais qui n’annule pas le fait que KCT perd de l’argent.

Ils ont posé le problème, nous avons engagé des discussions qui sont en cours. Le gouvernement est au courant, le gouvernement les suit. Je ne peux pas encore vous dire quelle sera l’issue de ces discussions. Nous pensons que d’ici la fin de l’année, on pourrait voir un peu plus clair. Et on s’en tiendra à ce que le gouvernement aura décidé. Parce qu’il appartient au gouvernement d’en décider.

Au sujet de votre préoccupation sur les arriérés de paiement, ce sont les choses qui font partie de la vie d’une entreprise. On peut se chamailler, et se réconcilier. C’est un mariage en réalité. Vous connaissez, vous, des mariages qui n’ont pas de problèmes ? Je comprends que les gens s’intéressent à ce sujet.

Mais je peux les apaiser. L’activité est en train de reprendre. Les chiffres sont en train de monter. Je suis sûr que d’ici la fin de l’année, ce sera encore mieux. Le gap va se combler petit à petit. C’est la première chose. Ce qui est plus important, c’est que KCT a résolument pris la décision de s’installer définitivement au Cameroun. J’ai comme l’impression que les choses se précisent. Même en termes d’investissements supplémentaires. Il y a beaucoup de choses pour lesquelles il y a lieu d’être optimistes. A mon avis, il n’y a pas de raison d’être pessimiste.

Vous avez évoqué l’aménagement des dessertes. Aujourd’hui, le Port Autonome de Kribi n’est desservi que par une seule voie, la route Edéa-Kribi en l’occurrence. Certes, une convention de financement a été récemment signée par le gouvernement pour la poursuite des travaux sur l’autoroute Kribi-Lolabé, et le contrat avec ICM CMC est signé sur la route Ebolowa-Akom2-Kribi. Vos informations vous permettent-elles de savoir s’il y aura une reprise des engins autour du port ?

Vous abordez-là, un sujet qui m’intéresse au plus haut point. Mais sur lequel je n’ai pas beaucoup d’influence. Puisque ce n’est pas moi qui construis les dessertes du port. J’exprime mes demandes, J’alerte, quand ça ne va pas. Je confirme qu’aujourd’hui, la desserte est un gros problème pour le Port de Kribi. Mais je fais confiance au gouvernement qui saura trouver des solutions.

2020 semble être une année de grandes réalisations. Vous avez fêté l’anniversaire de la deuxième année d’exploitation du Port Autonome de Kribi. Vous avez lancé le SIP, vous avez signé plusieurs contrats, accords-cadres et conventions dans tous les secteurs, avec des entreprises de BTP, des industriels, des techniciens comme l’ANOR, etc. Peut-on dire que le PAK est entré dans sa bonne cadence ?

Les signatures participent de la vie de tous les jours d’une structure comme celle-ci. Surtout, comme vous le savez, que nous sommes en train de mettre la structure en place. C’est normal que nous sollicitions d’autres structures pour nous accompagner. Le MATGENIE, l’ANOR, il y en a d’autres que nous avons sollicité.

C’est normal. Nous mettons une structure en face. Il faut qu’on s’assure que les choses se font de manière régulière, normale, dans les règles de l’art. Il y en a une qu’on a signé récemment avec le Ministère de l’Agriculture. Ça va continuer à se faire.

Pour revenir sur l’année 2020, oui, elle est pour nous une année avec beaucoup de perspectives. Le redémarrage de la phase 2 qui était un peu à la traîne. Il y a beaucoup de chantiers qui démarraient. Notamment la zone logistique, pour combler l’un des plus gros déficits, l’une des plus grosses faiblesses que nous avons, je veux parler de la capacité de stockage.

Mais 2020, tout de suite avec le COVID ne nous a pas épargné du tout. La phase 2 a pris un coup. Les chinois qui étaient allé passer le nouvel an chez eux n’ont pas pu revenir. Les entreprises qui avaient commencé à s’implanter ont arrêté les chantiers. Il y a eu comme un vide. Heureusement pour nous, ça n’a pas duré très longtemps. Puisque les chantiers ont repris. Même en termes de trafic, quand vous observez les étreintes, vous observez qu’en mars et avril, ça baisse pour repartir au mois de mai. Avec un mois de juin qui, pour nous, a été un mois de tous les records. Nous pensons bien que la tendance va demeurer. Si tout se passe bien, nous devrons avoir un bilan satisfaisant en 2020.

Malgré la crise sanitaire ?

Oui, malgré la crise sanitaire. Mais pour d’autres raisons. Notamment le fait qu’il y a d’autres armateurs qui ne touchaient pas le Port Autonome de Kribi. A l’instar du meilleur au monde, Maersk qui est arrivé et qui a boosté le trafic. Il y a même CMA CGM, en rapport avec Maersk qui relance la ligne ASAF. Tout de suite, ça se ressent sur le trafic, et sur tout ce qui est produit à partir du port. Il y a des gens qui continuent à dire que le Port ne fonctionne pas. Il faudra bien qu’ils expliquent comment la douane, pour le mois de juin a dépassé le seuil des 5 milliards. Il faut bien qu’ils nous disent d’où sortent ces recettes douanières, si le port ne fonctionne pas.

Je crois que les perspectives sont bonnes. Avec la signature de la convention sur le Terminal Polyvalent, on a un opérateur qui va se jeter dans la bataille, qui va certainement booster aussi à sa manière le trafic.

Une fois de plus, nous ne disons pas que le COVID-19 ne va pas impacter les activités du PAK. Par exemple, sur l’impact de cette crise, on note que les volumes de l’export ont baissé. Même si l’import, lui, augmente. L’analyse que nous avons fait, c’est que ce que nous avons enregistré comme import ici portait sur des commandes certainement déjà enregistrées route avant la crise. Le fait que l’export baisse tout de suite, a un lien avec notre capacité interne à gérer la secousse que le COVID a créée. Vous vous souvenez de l’époque où c’était la panique générale, où tout le monde a fermé, etc. Même les opérateurs se sont renfermés.

Maintenant, nous devons observer comment ça va réagir au niveau international. Et comment ça va repartir en interne. Il y a un rapport du GICAM qui est plus ou moins alarmant. Toutes ces choses-là devront avoir un impact sur le Port. Il nous revient de réagir pour que l’activité ne plonge pas. Il faut améliorer le service.

Interview réalisée par Frégist Bertrand TCHOUTA

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