Kahe Feukou « Les politiques mises en place par le gouvernement restent peu efficaces »

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Écrivain, Expert en normatif des dispositifs de de la signalisation routière, et non moins Président exécutif de « Pyramide Prévention », une association spécialisée dans la prévention des risques routiers, il analyse l’impact de la décision des mesures institutionnelles et propose des pistes de sortie de crise.

Ce vendredi, 30 mars, la société General Voyages Express a à nouveau défrayé la chronique à la suite d’un accident de la voie publique qui a fait 30 morts. A l’heure actuelle, savez-vous ce qui a pu causer l’accident?

Le bilan officiel fait état de plusieurs blessés et de 4 morts dont le chauffeur du camion impliqué et 3 passagers dans le bus de Général Express Voyage. Les causes réelles seront établies après le résultat de l’enquête ouverte par le ministre des Transports. D’ailleurs, il a bien fait de relever ce que nous les professionnels en charge des questions de la lutte contre les insécurités routières avons pris l’habitude de dire qu’un accident de la route n’est pas une fatalité. Il constitue un événement évitable lorsque nous les usagers de la route, nous respectons les règles du Code de la route. Étant donné que le dépassement et l’excès de vitesse seraient à l’origine de ce drame, je peux dire que la consommation de l’alcool et des stupéfiants jouent un rôle prépondérant dans les causes des accidents de la route. Lorsque des conducteurs se dopent pour faire plus d’heure de travail, et respecter les conditions de leurs employeurs. Relevons également qu’une mauvaise utilisation des feux de croisement et des pleins feux joue un rôle majeur dans les accidents qui se produisent de nuit dans nos axes routiers.

 

Cet accident survient seulement six mois après le dernier accident grave de la même agence survenu le 23 octobre 2017. Doit-on s’inquiéter de ce retour des bus de la mort?

Au regard des événements du vendredi 30 mars, nous devons être inquiets puisque cette agence de voyage n’est pas seule impliquée dans des cas d’accident de la route, mais il y a également d’autres usagers de la route concernés.

 

Avant la levée de suspension, l’entreprise avait fait circuler des images. On y voyait des personnels de General Voyages, suivant une formation sur la conduite. Répondant aux questions des députés à l’Assemblée nationale le 04 décembre, l’ex-ministre des Transports Edgard Alain Mebe Ngo’o avait justifié sa levée de suspension par le fait que l’entreprise avait fait preuve de « coopération » et de « Bonne foi ». Avez-vous l’impression que les vraies leçons n’ont pas été tirées?

Jusqu’ici, les politiques mises en place par le gouvernement pour lutter efficacement contre les accidents de la route restent peu efficaces. Les usagers ont plus ou moins l’impression d’avoir tiré des leçons de prudence quand ils ont déjà été impliqués en tant que conducteurs ou en tant que passagers dans un ou plusieurs accidents (expérience directe de l’accident) ou connaissent des proches ou gens de leur entourage ayant été accidentés (expérience indirecte de l’accident), ou encore considèrent que la situation à juger est une cause fréquente d’accident (fréquence perçue de l’occurrence de l’accident).

Une évaluation ainsi biaisée et irréaliste (dans le sens d’une surestimation de ses propres compétences de conducteur) semble fortement impliquée dans le risque d’accident chez les automobilistes. On pourrait penser que chaque conducteur tire les leçons de ses accidents, mais la littérature scientifique a produit des résultats divergents de l’expérience individuelle sur l’« optimisme comparatif ». Par exemple des auteurs concluent à un faible lien voire à une absence de lien entre les antécédents d’accidents et l’optimisme comparatif. D’autres concluent à un lien négatif ou trouvent un lien positif (Les automobilistes qui ont été impliqués dans un ou plusieurs accidents en tant que conducteurs ou en tant que passagers, comparés à ceux qui n’en ont pas eu, pourraient manifester davantage d’optimisme comparatif si, depuis leur expérience, ils ont modifié leur comportement dans le sens d’un plus grand respect du code de la route ou de l’adoption de précautions de sécurité).

D’un point de vue global, le Code du travail camerounais n’a pas prévu une obligation générale d’information et de formation, qui permet à l’employeur d’organiser et dispenser des informations aux travailleurs sur les risques pour la santé et la sécurité et les mesures prises pour y remédier. Il organise et dispense également une information des travailleurs sur les risques que peuvent faire peser sur la santé publique ou l’environnement les produits ou procédés de fabrication utilisés ou mis en œuvre par l’établissement ainsi que sur les mesures prises pour y remédier. L’employeur organise une formation pratique et appropriée à la sécurité au bénéfice : des travailleurs qu’il embauche ; des travailleurs qui changent de poste de travail ou de technique ; des salariés temporaires, à l’exception de ceux auxquels il est fait appel en vue de l’exécution de travaux urgents nécessités par des mesures de sécurité et déjà dotés de la qualification nécessaire à cette intervention. Enfin, à la demande du médecin du travail, des travailleurs qui reprennent leur activité après un arrêt de travail d’une durée d’au moins vingt et un jours.

Cette formation est répétée périodiquement dans des conditions déterminées par voie réglementaire ou par convention ou accord collectif de travail. L’étendue de l’obligation d’information et de formation à la sécurité varie selon la taille de l’établissement, la nature de son activité, le caractère des risques qui y sont constatés et le type d’emploi des travailleurs. Le législateur doit réviser le Code de la route, le code du transport et le code de la rue, tous ceux-ci nous permettra de gérer le risque professionnel qui permet d’avoir une baisse des accidents de la route.

Certains préconisent la reprise de la suspension. Est-ce une bonne solution?

La suspension des agences de voyages impliquées dans les cas d’accidents de la route n’apporte pas des solutions pour la lutte contre les insécurités routières, par contre ceux sont les réformes que j’ai proposé plus haut qui peuvent apporter des changements de comportement si appliquer, elle soit également suivie. Par contre il est à retenir que la lutte contre les accidents de la route nous concerne tous.

Interview réalisée par Frégist BERTRAND

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