Président de la Communauté ivoirienne des acheteurs, René DIGBEU se positionne comme l’un des précurseurs de ce métier peu connu en Afrique noire francophone.
Vous êtes présents à la conférence de « The African Road Builders-Trophée Babacar NDIAYE » en tant que acheteur. Qu’est-ce qu’un acheteur vient faire dans une conférence des BTP comme celle-ci ?
D’abord, la fonction achat c’est la notion de gestion d’entreprise qui est en charge de mettre à la disposition de l’entreprise tous les biens, services et travaux dont elle a besoin pour travailler. Je voudrais faire un petit rappel historique. Cette fonction a toujours existé. Mais elle s’est révélée à la fin de la guerre. A cette époque, la vie économique et celle des entreprises étaient bouleversées. Le peu d’entreprises qui ont survécu avait besoin de vivre.
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Elles ont commencé à vendre ce qu’elles pouvaient, ce qu’elles avaient. Les clients, face à une offre limitée, se contentaient de ce qu’il y avait sur le marché. A ces difficultés, ce sont ajoutées les crises pétrolières, la guerre froide, qui ont rendu l’environnement plus compétitif.
Aujourd’hui, il y a beaucoup d’entreprises, qui proposent une offre variée. Avec la compétition, les achats ont commencé à se révéler au sein de l’entreprise comme un acteur de développement. Amener l’entreprise à optimiser ses ressources, et agrandir ses bénéfices. On dit souvent dans notre métier : si vous achetez mal, vous ne saurez bien vendre.
Tel que vous expliquez, c’est un peu l’acheteur au sens marketing du terme…
C’est une fonction du marketing. Elle regroupe plusieurs dimensions. Il y a du marketing, du commerce, de la logistique, il y a même du droit, parce qu’on prend en charge les contrats. Il y a la finance, l’économie, les projets, le leadership, la communication. Parce que l’acheteur est un peu l’interface entre l’entreprise et le monde extérieur.
Pourquoi êtes-vous là ?
Au cours de la conférence, ce qui est ressorti c’est que les routes c’est l’économie. L’acheteur, aujourd’hui, est un levier économique. Il participe à la pérennisation et au développement de l’entreprise. Un exemple. Une optimisation de 3% sur les achats équivaut à un effort d’optimisation de 30% pour les ventes.
Il est plus simple de travailler sur les achats que de développer une artillerie sur les ventes. Voilà l’enjeu. Les achats deviennent donc un métier stratégique.
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Nous sommes ici parce que les grands projets d’envergure sont des projets de développement. Comme je vous l’ai dit, nous avons une fonction de développement. Et ces projets d’envergure engendrent des risques. Des risques financiers, économiques, juridiques, à divers niveaux qui font que les Etats perdent beaucoup d’argent.
Il faut une fonction achat outillée, moderne, compétente, professionnelle, mais aussi éthique, pour pouvoir appuyer, accompagner ces grands projets-là.
C’est ce qui justifie notre présence ici. Pour parler aux acteurs, aux bailleurs, pour leur dire qu’il faut dans leurs projets d’envergure, qu’ils prennent en compte cette dimension-là.
Qui doit-on former ici ? Les ingénieurs ?
Les ingénieurs sont des exécutants dans le processus. Derrière, il y a l’acheteur, qui aide dans la définition du besoin. Pour qu’un projet devienne réel, qu’il y ait un besoin. Ce besoin doit être défini. L’acheteur est là pour s’assurer qu’il soit dans les normes, il consulte le marché, pour savoir sourcer, trouver les bons fournisseurs.
Prenons un exemple. Il y a un marché public pour réhabiliter une route de 120 km. Quel est le rôle de l’acheteur, puisque le besoin a déjà été posé ?
L’acheteur intervient sur toute la chaîne. Il va falloir faire l’état des lieux. Il va falloir définir ou redéfinir le cahier de charges, il va falloir connaître le marché. Il y a des aspects opérationnels et techniques. Il intervient sur toute la ligne. Si on ne l’implique pas, on va avoir des gens qui vont se débrouiller, qui vont certainement arriver à réaliser le projet, mais ça ne sera pas efficient. Arriver à la fin avec le moins de dépenses possibles, par exemple.